Ne trouve-t-on vraiment aucun produit cosmétique testé sur les animaux en Europe ?
Oui, nous sommes le seul secteur pour lequel ces tests sont totalement interdits, sur tout le territoire de l’Union Européenne. Et pour s’assurer qu’aucun acteur ne contourne la loi, en pratiquant des tests sur animaux en-dehors de l’Union Européenne, le législateur a été encore plus loin : il est interdit, depuis 2013, d’utiliser les résultats de tests pratiqués sur des animaux pour s’assurer de l’innocuité et commercialiser un produit cosmétique, même si ces tests ont été pratiqués ailleurs qu’en Europe. La seule exception concerne les ingrédients déjà testés par une autre industrie : si par exemple l’industrie pharmaceutique a déjà testé un ingrédient sur des animaux, le secteur cosmétique a le droit d’utiliser les résultats de ces tests. Mais en aucun cas les entreprises de la filière cosmétique ne peuvent pratiquer ces tests elles-mêmes.
Mais une marque qui exporte dans certains pays, sait que ses produits seront testés sur les animaux. Ne devrait-elle pas plutôt renoncer à l’export dans ces pays ?
C’est un point que des ONG soulèvent régulièrement. Certains cosmétiques sont encore testés sur les animaux, du fait des règlementations nationales par exemple en Chine et dans d’autres pays, avant de pouvoir
être vendus sur leur territoire. Je précise que ces tests sont réalisés par les autorités locales et en aucun cas, par les entreprises cosmétiques elles-mêmes. Mais fort heureusement, le nombre de produits exemptés de
tests continue de progresser. Par exemple, et nous nous en félicitons, en 2021 la Chine fait encore évoluer sa réglementation et devrait arrêter de pratiquer ces tests sur un nombre croissant de produits, dès lors qu’un
certain nombre d’informations sur le produit sont fournies par les entreprises concernées. C’est parce que nous échangeons très régulièrement, depuis des années, avec nos homologues à l’international, que la réglementation évolue. La réglementation européenne a déjà inspiré d’autres pays : en Israël, en Californie, en Corée du Sud… Elle doit encore progresser ; c’est le sens de nos efforts, aux côtés des institutions européennes. L’objectif de l’industrie cosmétique : arriver à ce que l’interdiction en vigueur en Europe devienne mondiale (« global ban »), grâce aux efforts conjoints des acteurs du secteur cosmétique et des institutions européennes, encouragés par les ONG et les associations.
Comment expliquer que cette interdiction reste massivement ignorée du grand public ?
Il existe deux raisons. La première tient à la subsistance, dans certains pays du monde, de tests effectués par les autorités locales. Ces pratiques suscitent, à raison, de nombreux débats qui parviennent jusqu’en
Europe, alors même que l’interdiction y est déjà en vigueur, et ce, depuis 2004. La seconde raison est que certains produits continuent d’afficher des mentions du type « non testé sur les animaux », ce qui laisse penser que les produits qui n’affichent pas cette mention pratiqueraient ces tests. C’est évidemment faux, mais cela crée de la confusion chez les consommateurs. Ces allégations ne sont d’ailleurs pas autorisées par les autorités de contrôle françaises et européennes, puisqu’un produit ne peut se prévaloir de respecter la réglementation en vigueur. Les seules allégations qui sont parfois tolérées par la DGCCRF, sous certaines conditions, sont celles qui répondent à un cahier des charges spécifique : c’est le cas de certains labels qui attestent d’engagements supplémentaires de la marque en faveur de la cause animale.
Si on ne teste plus sur les animaux, comment alors s’assure-t-on de l’innocuité des produits avant leur mise sur le marché ?
Un investissement massif tant scientifique, que financier et humain a été déployé par les entreprises cosmétiques, bien avant l’interdiction européenne, pour développer des méthodes de substitution afin d’établir l’innocuité des produits. Le secteur continue à y travailler et contribue à de nombreuses initiatives scientifiques : notamment, la culture de cellules de peau, qui permet de reconstituer des tissus humains.
Ou encore, des tests « in vitro » qui permettent d’étudier les propriétés irritantes de nouvelles substances ; mais aussi des tests « in silico » qui permettent par exemple de modéliser informatiquement l’évolution de
la molécule dans l’organisme. Ces méthodes apportent de réelles avancées scientifiques, au-delà du monde de la cosmétique : elles sont également utilisées par la médecine ou par d’autres secteurs.